retour

back


Quinault
Philippe
(1635-1688)




 

 



 


Décrit par ses contemporains comme l'homme le plus aimable qui soit, et doté de toutes les qualités requises pour briller dans la société de son époque, Philippe Quinault était le fils d'un maître-boulanger. Protégé du poète Tristan l'Hermite, il fit ses premières années d'étude chez le maître écrivain Philippe Mareschal, avant d'entrer au Collège du Cardinal Lemoine pour y apprendre le droit. Il devint avocat en 1655, année où il publia également sa première pièce, Les Rivales. A cette époque, et grâce à son aisance et à son esprit, Quinault était déjà un des favoris des Salons précieux où il figurait sous le nom de Quirinus. En 1660, Quinault épousa une jeune veuve dont la dot lui permit d'acheter une charge de Valet de Chambre du roi. La même année il commença à participer à la création des divertissements royaux, écrivant des paroles pour Le Triomphe de Bacchus dans les Indes, mascarade, 1666 ; Le Ballet Royal des Muses, 1666 ; Les Poètes et La Pastorale comique, avec Molière, en 1667. En 1670, il fut élu à l'Académie française, et en 1771, il obtint la charge d'Auditeur de la Cour des Comptes. Par la suite il devint le librettiste favori de Lully et écrivit pour lui ses plus belles tragédies. Ses livrets furent souvent critiqués (Boileau lui reprocha l'indigence de son vocabulaire), pourtant ils étaient parfaitement adaptés.

Le site de Buford Norman
dédié à Quinault


Les Livrets sur Internet
Libretti on the Internet

En français :
Jean-Baptiste Lully

English translations by Frank J.Morlock
Munseys


Atys

Bibliographie
(Bibliography)

Philippe Quinault, Livrets d'Opéras, présentés et annotés par Buford Norman, 2 vol., in Collection de rééditions de Textes du XVIIe siècle, Société de Littérature Classique, Toulouse, 1999.
(diffusion : Editions Klincksieck, Paris)

Buford Norman, Touched by the Graces: The Libretti of Philippe Quinault in the Context of French Classicism, Summa Publications, 2001.

William Brooks, Philippe Quinault, dramatist, Peter Lang, 2009.

Buford Norman, Quinault, Librettiste de Lully - Le Poète des Grâces, Mardaga, 2009. Il s'agit de la traduction française, mise à jour et augmentée, de Touched by the Graces.

 

Pièces de Théâtre

Les Rivales,

Stratonice, 1659

Astrate, tragédie,  1664.

La Mère Coquette, 1665.

La Comédie sans Comédie.

Bellérophon
, tragédie, 1679.

Terminez mes tourments, puissant Maître du monde;
Sans vous, sans votre amour, hélas !
Je ne souffrirais pas.
Réduite au désespoir, mourante, vagabonde,
J'ai porté mon supplice en mille affreux climats ;
Une horrible Furie attachée à mes pas,
M'a suivie au travers du vaste sein de l'Onde.
Terminez mes tourments, puissant Maître du monde ;
Voyez de quels maux ici-bas
Votre épouse punit mes malheureux appas.
Délivrez-moi de ma douleur profonde ;
Ouvrez-moi par pitié les portes du trépas.
Terminez mes tourments, puissant maître du monde ;
Sans vous, sans votre amour, hélas !
Je ne souffrirais pas.
C'est Jupiter qui m'aime ! eh ! qui pourrait le croire ?
Je ne suis plus dans sa mémoire.
Il n'entend pas mes cris, il ne voit pas mes pleurs ;
Après m'avoir livrée au plus cruel des malheurs,
Il est tranquille au comble de la gloire ;
Il m'abandonne au milieu des douleurs.
Ah la fin, je succombe, heureuse si je meurs.

Isis, V, 1, Io.

 

Opéras et Ballets
(musique de Lully)

La Grotte de Versailles, églogue en musique, 1668.
Psyché
, tragédie-Ballet, 1671 (en collaboration avec Molière, Corneille...)
Les Fêtes de l'Amour et de Bacchus
, pastorale, 1672.
Cadmus et Hermione
, tragédie, 1673.
Alceste ou le Triomphe d'Alcide, tragédie1674.
Thésée, tragédie,1675.
Atys, tragédie,1676.
Isis, tragédie, 1677.
Proserpine, tragédie, 1680.
Le Triomphe de l'Amour, ballet, 1681.
Persée, tragédie, 1682.
Phaéton, tragédie, 1683.
Amadis, tragédie, 1685.
Le Temple de la Paix, ballet, 1685.
Roland, tragédie, 1686.
Armide, tragédie, 1687.

PROSERPINE, par un Témoin de l'époque,
 où comment l'on décryptait l'opéra.

"L'opéra est au-dessus de tous les autres. Le chevalier dit qu'il vous en a envoyé plusieurs airs et qu'il a vu un homme qui doit vous avoir envoyé le livre ; vous en serez contente. Il y a une scène de Mercure et de Cérès qui n'est pas bien difficile à entendre. Il faut qu'on l'ait approuvée puisqu'on la chante ; vous en jugerez."
Madame de Sévigné, lettre du vendredi 9 février 1680

La scène dont il est question était la suivante :
Proserpine vient trouver Cérès (I, 2), pour la prier, de la part de Jupiter, de rendre fertiles les plaines de Phrygie, lui faisant sentir combien elle devait être flattée de voir le plus puissant des Dieux s'adresser à elle, mais Cérès lui répond :

"Peut-être qu'il m'estime encore ;
Mais il avait promis qu'il m'aimerait toujours
(...)
Quand de son coeur, je devins souveraine,
N'avait-il pas le monde à gouverner ?
Et ne trouvait-il pas sans peine
Du temps de reste à me donner ?
Je l'ai vu sous mes lois, ce dieu si redoutable ;
Je l'ai vu plein d'empressement.
Ah ! qu'il serait aimable,
S'il m'aimait constamment !"

Là où l'opéra montrait Jupiter et Cérès, la Cour voyait Louis XIV et Madame de Montespan.
Pour cette même raison, Isis, valut à Quinault quelques années de disgrâces, car on avait vu en la pauvre Io, poursuivie par la furie vengeresse d'une Junon impitoyable, Madame du Ludre, la nouvelle conquête du Roi. Madame de Montespan, quant à elle, n'avait guère apprécié de se voir associée dans tous les esprits à l'implacable Junon finit par obtenir qu'on éloignât Quinault de la Cour. Quinault n'y était pour rien. L'Opéra avait été écrit avant la liaison, et il avait obtenu l'aval de la censure, mais, madame de Montespan fut aussi impitoyable que la Déesse à laquelle on l'avait associée.

"Il avait plus d'esprit qu'on ne pouvait dire, adroit et insinuant, tendre et passionné. Il parlait et écrivait fort juste ; et fort peu de gens pouvaient atteindre la délicatesse de ses expressions dans les conversations familières."
Boscheron.
Les livrets de Quinault furent réutilisés par plusieurs compositeur. Quelques exemples :
Thésée fut repris par Haym pour Händel, en 1713. Le livret de Quinault fut également réutilisé par Mondonville en 1765.
Phaéton, repris par Villati & Algarotti et mis en italien pour Graun, devint Fetonte qui fut joué à Berlin en 1750.
L'Armida, de Durazzo & Migliavacca pour Traetta en 1761 et jouée à Vienne était elle aussi tirée du livret de Quinault.
En 1777, Gluck, remit en  musique l'Armide de Quinault. Une grande première, car la réutilisation des anciens livrets n'était pas une pratique courante de l'opéra français. A la suite de Gluck, Marmontel retravailla ("marmontelisa", selon l'expression de l'époque) plusieurs des livrets de Quinault pour Piccini : Roland, Atys (1780) & Persée (1781), y pratiquant des coupes sombres, pour les abréger en trois actes au lieu des cinq originaux.

L'hiver qui nous tourmente
S'obstine à nous geler,
Nous ne saurions parler
Qu'avec une voix tremblante.
La neige et les glaçons
Nous donnent de mortels frissons.
Les frimas se répandent
Sur nos corps languissants,
Le froid transit nos sens,
Les plus durs rochers se fendent.
La neige et les glaçons
Nous donnent de mortels frissons.

Isis, IV, 1, Choeur des Peuples des Climats glacés.

A découvrir absolument

Roland
de Lully & Quinault
par Christophe Rousset & Les Talens lyriques

Le chef d'oeuvre absolu, tant au point de vue de l'oeuvre qu'à celui de l'enregistrement.